Source : socheese.fr par Arnaud Sperat-Czar, Florence Boulenger
365
365, c’est ce que répondent en chœur tous ceux à qui l’on a déjà rapporté la citation, attribuée tantôt à Charles de Gaulle, tantôt à Winston Churchill, selon laquelle la France compterait « autant de fromages que de jours dans l’année ». Mais en réalité, les fromages français sont infiniment plus nombreux.
Plus de 1 600
Le seul « Guide des fromages au lait cru » publié chaque année depuis 2002 par le magazine Profession fromager recense 1600 produits. Mais ce guide ne prétend pas à l’exhaustivité, et ne s’intéresse pas aux fromages au lait thermisé ou pasteurisé.
570 + 1 500
À défaut de compter les fromages, on peut compter les fabricants. Les données chiffrées sont plus nombreuses (ou moins rares). La dernière enquête annuelle Agreste (ministère de l’Agriculture) dénombrait 570 fromageries en 2009, mais ce chiffre n’intégre pas les producteurs fermiers. Le Cnaol, qui regroupe tous les fabricants de fromages sous AOP recense quelque 1 500 fermiers pour ses 47 filières. Mais ils sont aussi très nombreux à travailler hors AOP, notamment dans les filières caprines, où chaque ferme crée volontiers « son » crottin ou sa « bûche » maison… Au strict minimum, la France compte donc 2 070 producteurs.
3 500
Le ministère de l’Agriculture recense également les « établissements de transformation de lait et produits laitiers », dans la mesure où ils doivent être titulaires d’un numéro d’agrément sanitaire. La liste officielle en compte quelque 3 500. Mais parmi eux ne figurent pas seulement des fabricants de fromages affinés : la liste inclut des producteurs de yaourts, de lait en bouteille ou de glaces.
On peut compter les producteurs, mais lorsqu’il s’agit de comptabiliser les fromages, c’est beaucoup plus complexe. D’autant que la plupart des fabricants déclinent volontiers leurs « premiers-nés » : en les aromatisant (au poivre, aux herbes de Provence, au paprika…), en allongeant les durées d’affinage, en modifiant leur grammage pour donner vie à des « petits frères » ou « cousins ». Le compteur, à ce rythme, peut vite s’emballer… D’autres producteurs font preuve d’un grand sens créatif en inventant un nouveau fromage par an ; c’est le cas de la Ferme de Cabriole, en Haute-Garonne (lien) et de ses Cayrou, Pâquerette, Corne de vache, Cathare, Yolidoulidoux…
Historiquement, de nombreux fromages ont vu le jour avec l’arrivée des quotas laitiers, en 1984 quand les éleveurs ont souhaité mieux valoriser leur lait. En parallèle, d’autres disparaissaient, faute de repreneurs ou en raison d’un vaste mouvement de concentrations : la France comptait 350 000 exploitations laitières au début des quotas laitiers, elles n’étaient plus que 80 000 en 2010.
118
Autre façon de tenir les comptes : se pencher sur les étals des des crémiers-fromagers. D’après une enquête menée en 2011 par la FNDPL, le Cnaol et le magazine Profession fromager, on trouve en moyenne 118 références de fromages chez les détaillants, avec une préférence pour les AOP et fromages fermiers au lait cru. Un chiffre plus modeste que les précédents, mais qui garantit une vraie diversité.
20 familles
Enfin, il existe une tout autre façon de dénombrer les fromages : en les recensant par « famille ». Comment fabrique-t-on un fromage ? À question simple, réponse complexe ; et des « ramifications » que celle-ci prendra découle la grande richesse du plateau français.
En effet, le fromage a pour but premier de conserver le lait en différant sa consommation (d’une poignée de jours à deux ans, voire davantage pour certaines pâtes pressées). Or, plus l’on veut conserver longtemps un fromage, plus il faut réduire sa teneur en eau. C’est ainsi qu’on en vient à privilégier un égouttage naturel et spontané, pour obtenir un fromage frais à consommer rapidement, comme le Saint-Florentin. En tranchant le caillé, on perd davantage d’humidité et on s’achemine vers la famille des pâtes molles (camembert, brie, munster, livarot…). Si l’on souhaite aller plus loin, on chauffe le caillé (à plus ou moins haute température) et on le met sous presse… La famille des fromages à pâte pressée regroupe donc le saint-nectaire, la tomme de Savoie… mais aussi les pâtes pressés cuites comme le beaufort ou le comté.
D’autres paramètres jouent sur le profil du fromage : l’affinage (quelles flores de surface favorise-t-on ?), l’enrichissement du lait, en matière grasse notamment, les formats (selon sa forme et son poids, un fromage « réagit » différemment), les espèces animales (vache, chèvre, brebis, fromages mixtes…). Le classement peut facilement tendre au raffinement, mais les technologues s’accordent sur une vingtaine de grandes familles de fromages.